Départ de la Mini Transat : Les Frérots prêts à en découdre

Il y a deux ans jour pour jour, Thaïs le Cam et Julien Letissier s’imaginaient au départ de la Mini Transat…Ce jour là, pour Thaïs, une envie de prendre enfin le large remonte et pour Julien, celle de retenter l’aventure. De ces envies presque viscérales est né le projet Frérots Sailing* avec la complicité de Valentin Noël. Un an et demi après, deux protos neufs sont mis à l’eau avec pour objectif : être au départ de la Mini Transat le 24 Septembre. Mission accomplie puisque Thaïs, sur son proto 1068 (a.k.a Pénélope Pussycat) et Julien Letissier, sur son proto 1069 (a.k.a BigOrNo) ont amarré leurs montures il y a quelques jours au ponton des Sables d’Olonne. A trois jours du départ, l’envie de prendre enfin le large se fait ressentir. Les bateaux sont prêts, les marins, eux, sont prêts à en découdre.

C’est l’histoire de trois copains : Thaïs Le Cam, Julien Letissier et Valentin Noël qui avaient des envies de large en Mini mais de faire les choses différemment en mutualisant leurs compétences à terre pour mieux partir, seul, en mer. L’idée mûrit et les trois frérots dessinent leur projet. Ils vont choisir David Raison comme architecte navale et collaborer en partie avec IDB Marine, où Valentin Noël était en charge d’une partie de la production. L’autre grosse partie a été faite par les Frérots, dans le chantier de Stand As One à Port-La-Fôret.

En juillet 2022, le proto1068, surnommé Pénélope Pussycat, sort de chantier et découvre son élément naturel. S’ensuivent des navigations d’entraînements et de mise au point pour peaufiner les réglages du bateau avant la première course de la saison. En parallèle, le lancement du deuxième proto démarre. Quatre mois plus tard, le proto 1069, au doux nom de BigOrNo, rejoint lui aussi son élément fin janvier 2023. L’histoire imaginée un an et demi auparavant est maintenant concrète, le compte à rebours pour être au départ de la Boulangère Mini Transat 2023 débute.

La devise du projet Frérots Sailing est claire : avoir des bateaux identiques est une vraie force; la mutualisation des compétences de chacun permet de maximiser le temps entre la construction et les entraînements en mer. Présentation de nos deux frérots en compétition :

Tout d’abord, nous avons Thaïs Le Cam, finistérienne dans l’âme, qui a fait ses armes à Paris dans l’événementiel automobile après quelques expériences dans la course au large mais à terre, pour l’instant. L’appel de la mer aura été plus fort et Thaïs retourne en terre bretonne pour construire son projet course au large à elle. Son atout ? Aller chercher les partenaires ! Pas de partenaires, pas de bateaux, pas de bateaux, pas de projet… Elle a donc utilisé son réseau, ainsi que celui des autres Frérots, pour trouver l’argent nécessaire afin de lancer la construction du premier Proto. En début d’année, elle s’engage à 100% dans le projet afin de boucler le budget et de mettre aussi les mains dans la colle. Une sortie de zone de confort qui paye, avec au bout du compte, deux bateaux neufs et bien nés et un club d’entreprises partenaires* fier de les accompagner.

Ensuite, nous avons Julien Letissier, ce parisien qui a vite su qu’il était mieux sur l’eau que dans le métro. Il a gravité quelques années autour du monde du nautisme avant de se lancer en 2019 dans l’aventure Mini avec un bateau de série. Il terminera 14e avec déjà l’envie d’y revenir, un jour. Une préparation de Vendée Globe aux côtés de Jean Le Cam et une autre aux côtés d’Amélie Grassi pour la construction de son Class40 ( en vue de la Transat Jacques Vabre 2021), le voilà prêt à prendre son envol et d’avoir son projet. Julien mettra à profit tout ce qu’il a appris pendant ces années.

Comment vous vous sentez à quelques jours du départ ?

Julien Letissier : « Je me sens prêt, je suis assez serein, pas stressé et surtout j’ai très envie d’y aller. Le plus difficile est de rester serein dans le fait qu’on est prêt, que les bateaux le sont aussi et qu’on a bien travaillé. Maintenant il faut y aller ! »

Thaïs Le Cam : « ça va bien ! J’ai eu quelques coups de stress mais c’est normal; mentalement je me sens prête. C’est aussi assez émouvant d’être là, sur les pontons de la Mini Transat. Avec Julien et Valentin, nous nous sommes remémorés qu’il y a deux ans, on avait ce projet avec des rêves qui n’existaient pas encore, et aujourd’hui, nous sommes là avec deux bateaux bien préparés. L’émotion sera encore plus grande dimanche au moment du départ ponton. »

Quelles sont vos envies sur cette transat ?

J.L : « C’est rester dans la lignée du projet Frérots Sailing. Je ne veux pas avoir de regrets non plus sur des options hasardeuses ou faire des bêtises sur le bateau, sans parler de casse, car ça, nous ne sommes jamais à l’abri..J’aimerais faire une jolie trace et me faire plaisir, c’est important. »

T.L.C : « Honorer ce projet et pour l’honorer c’est naviguer propre. C’est d’arriver sur une première et une deuxième étape heureuse de ma performance et s’il y a un classement à la clé c’est encore mieux ! »

Comment allez-vous aborder cette course ?

J.L : « Je pense faire comme d’habitude, j’ai mon schéma de course en tête avec les options possibles et tendances, même si la météo peut changer. J’essayerai de ne pas me laisser polluer par les options des autres même si j’aime bien être au contact pour se jauger. Je suis assez joueur.. s’il y a des coups à faire, même si je suis tout seul, j’irai ! »

T.L.C : « Je vais essayer d’établir ma stratégie au moment venu par rapport aux données et à mon appréhension. Après, je ne vais pas partir dans les extrêmes, il ya un moment donné où il faut ce dire que tu ne peux pas ré-inventer la poudre dans une première traversée. »

Avez-vous certaines appréhensions ?

J.L. : « J’ai appris que j’ai un statut de favori sur la course…on est presque une dizaine à pouvoir gagner la course. De plus, on peut être extrêmement surpris par un concurrent qui n’a pas cette étiquette. J’essaye de partir sans penser à ce qu’on attend de moi, mais plutôt en pensant à ce que moi j’ai envie car j’ai du mal à gérer cette pression. »

T.L.C : « Les grains forcément…mais je pense qu’on est prêts à quasiment tout sauf à un problème de mât, mais globalement il y a un moment où il faut arrêter de s’imaginer le pire parce que sinon on ne fait jamais rien ! Si on rencontre une grosse dépression météorologique, il faut serrer les fesses et mettre le bateau en sécurité. Le plus important est de ne pas me mettre dans le rouge, ni le bateau. »

Des envies plus personnelles sur cette Transat ?

J.L : « Prendre du plaisir à faire la traversée, j’aimerais bien avoir tous les jours la sensation que je suis bien sur le bateau. En 2019, j’ai pas mal subi la course avec mes problèmes d’énergie et ça m’a un peu sapé ma course. Si cette année, j’ai cette déception d’arriver car c’est déjà fini, je serai content. Si je peux vraiment apprécier les moments sur le bateau, que ce soit les bons ou les mauvais, c’est cool et être en mode à l’attaque tout le temps. Je n’ai jamais été déçu avec le bateau sur des petites courses donc je pense qu’on va bien s’entendre sur la transat. »

T.L.C : « C’est prendre du plaisir. Je sais que je suis bien en mer, que je suis bien toute seule, j’ai confiance en mon bateau donc j’espère que je vais kiffer ! Je pense que je vais aussi apprendre plein de choses parce qu’une première Transat, ça marque. Je veux arriver à bien gérer les moments difficiles et rester concentrée pendant ces moments là. Dans mon imaginaire, je suis dans les Alizés, en train de barrer, à écouter de la bonne musique. C’est la libération du projet pour moi cette transat. »

Un point météo ? Et comment vous abordez cette partie.

J.L : « On se fait un point tous les midis avec Ronan Cointo (il travaille pour Jean Le Cam et a été son premier préparateur figaro notamment sur ses préparations météo.ndlr), c’est une personne qui maitrise le sujet. Il prépare ses points tous les jours avec Jean Le Cam et Bernard Stamm. A l’approche du départ, nous allons analyser les options qui se dessinent deux fois par jour. L’idée est de progressivement penser aux choix à faire et de les assumer. »

T.L.C : « Il y a deux tendances une bonne et une moins bonne forcément. Et j’aimerais bien signer pour la plus optimiste ! Ça me permettrait de partir sans stress et de rentrer dans la course car déjà il faut se faire à l’idée qu’on est parti sur son petit bateau.. »

Comment on gère sa stratégie personnelle dans un projet mutualisé ?

J.L : « On a tous les deux des moments à deux imposés tous les soirs, mais aussi chacun nos phases de consultation de la météo seul. On travaille dans une dynamique différente, soit on discute avec un autre coureur ou un autre entraîneur. On partage toutes les infos qu’on a, on essaye de trier ce qui est intéressant ou pas. De toute façon, on ne sera pas ensemble sur l’eau, la course est faite pour avoir une surface de jeu tellement énorme. On va être opportuniste chacun de notre côté, mais avec les mêmes réflexions. »

T.L.C : « On a les mêmes informations mais les choses peuvent évoluer rapidement. J’ai beaucoup étudié les documents de météorologues, de routeurs pour établir ma stratégie. Si je vois la flotte partir d’un côté et que je suis sûre de moi pour partir de l’autre, je le ferai. »

Photos – Vincent Olivaud – Mini transat

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KEDGE est une grande école de commerce et de management basée principalement à Marseille et Bordeaux. L’école a décidé de soutenir Thaïs et le projet Frérots Sailing. 
Thaïs a étudié au campus de Bordeaux entre 2013-14 et à Marseille dans le cadre d’un master spécialisé en 2017-18. Elle devient ambassadrice Alumni pour animer des conférences auprès de leurs futurs entrepreneurs. Grâce aux compétences acquises tout le long de son cursus, Thaïs a pu construire le projet Frérots Sailing.

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